Requiem
En ce jour du vendredi saint où les chrétiens célèbrent la passion et mort du Christ, je veux avoir une pensée pour ceux qui mourront aujourd'hui loin des leurs.
Lundi dernier, une infirmière du bloc opératoire a enterré sa maman. En petit comité. Nous aurions été nombreux à vouloir l'entourer en temps normal mais le nombre limité de personnes acceptées aux obsèques est cruel.
Je voudrai rendre hommage à deux collègues morts ces jours-ci, qui se connaissaient bien. Ils méritaient des cérémonies à la hauteur de leur engagement de médecin.
Il y a d'abord le Pr Robert SOYER, décédé brutalement le 1er avril. Créateur du service de chirurgie cardiaque du CHU de Rouen,
initiateur des greffes cardiaques en Normandie, c'était un grand chirurgien et un grand organisateur. Je me souviens de sa capacité à trouver des lits d'aval lors des staffs de réanimation. On annonçait : " pas de place pour sortir les patients et en opérer de nouveaux " ! Il prenait son téléphone et, par miracle, des solutions apparaissaient ! Ou encore sa phrase fétiche en entrant dans la chambre d'un opéré : " vous savez, c'était pas du luxe ! " qui provoquait un flot de reconnaissance dudit opéré. Chirurgien expert, mélomane averti, à l'écoute des mutations de notre société et du monde, il a été mis en terre mercredi au cimetière monumental entouré de 7 amis et d'un petit bouquet de fleurs de pissenlit qu'il avait souhaité. Deux membres de sa famille, confinés au pays basque, avaient envoyé un témoignage audio et la cérémonie s'est terminée par l'agnus Dei du requiem de Fauré. "Un départ en toute humilité pour un grand homme" comme me le rappelait son ami René Koning.
Le deuxième collègue était anesthésiste à la clinique Saint Hilaire : le Dr Jean-Pierre GARRIGOUX. Décédé samedi, après s'être battu contre sa maladie avec courage pendant plus de 5 ans, il regardait sa santé avec beaucoup de lucidité et de volonté. Ce médecin, à l'humour reconnu, avait importé plusieurs techniques d'anesthésie à Saint Hilaire. Passionné de bridge et de golf, son empathie et sa bonne humeur étaient appréciées de tous. Les obsèques auront lieu le 16 avril à l'église de Bihorel. La poursuite du confinement nous empêchera malheureusement de pouvoir entourer Marie-Odile son épouse et toute sa famille...
En tant que catholique, ma prière les accompagne ainsi que tous ceux qui partagent une souffrance en ces jours difficiles.
J'invite ceux qui les ont connus à partager une pensée pour eux mais surtout, de nous inspirer de leur passion de soignant pour en être les dignes successeurs ! Aujourd'hui plus que jamais.